Famiweb: Les adultes ont-ils tendance à exclure les jeunes enfants d'un deuil ?
Denise Demedt du Toict: Les parents ou les proches sont souvent trop pris par le deuil pour bien accompagner un enfant, répondre à ses questions. Pourtant, il est essentiel de tout expliquer aux enfants. Sinon, ils s'imaginent les pires choses. « Grand-père est parti parce que je n'étais pas sage. » « Maman doit étouffer dans cette caisse. Et comment elle va manger ? »
F.: Comment répondre aux interrogations d'un enfant face à la mort ?
DDdT: La chose essentielle est d'être sincère, et dire ce que l'on croit. Vers quatre ans, qu'ils y soient confrontés ou non, beaucoup d'enfants, posent des questions sur la mort. Cela prend souvent la forme suivante: «Maman, est-ce que tu peux mourir?» Beaucoup de mères répondent que non, qu'elles sont en bonne santé. En réalité, l'enfant sait qu'une mère peut mourir. La bonne réaction est celle qui est sincère. «Tout le monde peut mourir. Maman aussi.» Il faut ensuite chercher à rassurer l'enfant. «Chez qui aimerais tu aller si on mourrait papa et moi?» Les enfants trouvent chez qui ils veulent aller, et cela les rassure.
F.: Quelles sont les explications à éviter ?
DDdT: Ne pas dire que le mort s'est endormi. L'enfant développe alors des angoisses lorsqu'il va dormir. L'autre travers est de parler d'un voyage. J'ai rencontré une petite fille à qui on avait dit que sa grand-mère était en voyage. La petite fille ne comprenait pas pourquoi mamy la laissait sans nouvelles. Elle a cru que sa grand-mère ne voulait plus la voir.
F. : Comment faut-il réagir dans le cas d'un décès avec de tous jeunes bébés qui ne parlent pas?
DDdT: Leur parler. On peut tout expliquer. Même une femme enceinte doit parler à son enfant, lui expliquer sa tristesse. Les bébés comprennent plus que ce qu'on ne croit.
F.: Des parents peuvent-ils pleurer devant un enfant ?
DDdT: Il faut pleurer avec l'enfant, expliquer pourquoi on est triste. Bien sûr, c'est très angoissant pour un enfant de voir ses parents pleurer. Mais encore plus angoissant de ne pas savoir pourquoi. L'enfant risque alors de culpabiliser.
F.: Comment le faire participer aux préparatifs, aux adieux?
DDdT: L'enfant doit participer à la célébration d'enterrement. Il faut aussi l'emmener voir le mort. Beaucoup d'enfants, je le sais par confidence, s'attendent à voir un squelette. Il faut expliquer au contraire que le mort est beau et paisible, mais prévenir qu'il est froid.
F. : Comment réagit un enfant qui n'a pas fait son deuil ?
DDdT: Il aura des réactions à retardement. Il garde en lui une culpabilité, ou une incompréhension. Il y a des enfants qui ne versent pas une larme. J'ai rencontré en consultation un petit garçon de trois ans, qui n'avait pas pleuré la mort de sa petite sœur ni donné signe de tristesse. Son entourage le jugeait totalement insensible. En réalité, le petit garçon ne s'autorisait pas à être triste. Par culpabilité. Jaloux de l'attention accordée à sa petite sœur, il avait demandé qu'on la jette à la poubelle... C'est terrible pour un enfant de porter cela.
Gaëtane, Rédactrice de famiweb.be